L’hôpital n’est pas une entreprise

Publié le par SPHAB/CGT (56-Guémené)

L'hôpital n'est pas une entreprise

Par André Grimaldi,

Chef du service de diabétologie à La Pitié-Salpêtrière

 

Le mouvement de défense de l'hôpital public (MDHP) refuse la suppression des emplois sans aucune justification médicale (voir notre édition d'hier). Il s'oppose également à la transformation de l'hôpital en entreprise gérée par un PDG. Pour nous, les structures de base de l'hôpital ne sont pas des structures de gestion mais des structures de soins, là où les équipes médicales et paramédicales travaillent ensemble pour soigner les malades. Ce sont les services. Dans la mesure où les services se sont de plus en plus spécialisés, il a fallu parfois les regrouper dans des départements pour assurer la prise en charge globale des patients. Par exemple, trois services de cardiologie de la Salpêtrière ont fusionné dans un département de cardiologie où on traite l'insuffisance cardiaque, mais aussi les infarctus du myocarde ou les troubles du rythme cardiaque. Le département a donc une cohérence médicale et la rotation des jeunes médecins et des infirmières dans les différentes unités qui le composent a du sens pour eux comme pour les malades. Il est donc faux de parler de l'absence d'adaptation de l'hôpital. La loi, elle, ignore ces structures de soins. Elle ne parle que de gestion et des structures de gestion : « les pôles ». Ces pôles regroupent en moyenne cinq services, souvent sans avoir grand-chose en commun. Ainsi à la Pitié il existe un pôle de néphro-chirurgie comprenant la maternité, l'orthopédie, la néphrologie, la chirurgie endocrinienne, la chirurgie vasculaire, l'urologie. Ainsi, une femme qui accouche à la Pitié n'accouche plus à la maternité mais dans le pôle de néphro-chirurgie !

 

La loi hôpital entreprise de Madame Bachelot réduit l'hôpital à sa gestion, et la gestion au PDG, seul maître à bord. Il y a en réalité deux pouvoirs à l'hôpital : un pouvoir soignant médical et non médical, qui devrait être mieux organisé, et un pouvoir de gestion. Ces deux pouvoirs doivent collaborer, comme c'est le cas aujourd'hui dans la majorité des cas, mais il est absurde et dangereux qu'un directeur pouvant venir du privé, sans compétences médicales ou de santé publique, ait, comme le prévoit la loi, le pouvoir de décider du projet médical (fermeture ou création d'une activité), d'embaucher un médecin, de le rémunérer en fonction de sa rentabilité, de le révoquer à sa guise. Ce directeur tout-puissant sera lui-même révocable par le directeur de l'agence régionale de santé (ARS), nommé en Conseil des ministres. La loi institue donc un pouvoir vertical sans partage et largement politisé. La loi met ainsi en musique la parole du président réclamant un seul chef à l'hôpital. Cette fascination par le culte du chef à l'allemande se traduit en réalité pour une pratique à l'italienne.

 

Article paru dans l'Humanité du 5 mai 2009-rubrique : l'invité de la semaine

 

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