Les allégements fiscaux ont privé l'Etat de 7,6 milliards de recettes en 2008

Publié le par SPHAB/CGT (56-Guémené-sur-Scorff)

Les allégements fiscaux ont privé l'Etat de 7,6 milliards de recettes en 2008

La Cour des comptes souligne le dérapage des dépenses, qui ont augmenté de 3,4 %

 

L'Etat ne tient ni ses recettes ni ses dépenses. C'est ce qui ressort de la synthèse du rapport sur l'exécution budgétaire 2008 annexé au projet de loi de règlement, qui est présenté mercredi 27 mai en conseil des ministres. Le premier président de la Cour des comptes, Philippe Seguin, doit présenter les grandes lignes de ce document le 3 juin aux commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat.


En 2008, le déficit budgétaire a augmenté de 47 % pour s'établir à 56,3 milliards d'euros alors même que la dégradation de la conjoncture a eu un impact limité, " au plus égal à 4 milliards " sur les recettes fiscales nettes. Autrement dit, ce n'est pas la récession qui explique la forte hausse du déficit budgétaire, mais la combinaison de deux éléments : l'Etat s'est privé de recettes précieuses en poursuivant la politique d'allégements fiscaux engagée avec la loi TEPA du 21 août 2007. Par ailleurs, il ne maîtrise pas ses dépenses.


La haute juridiction financière fait aussi remarquer que 5,9 milliards de dettes exigibles en 2008 n'ont pas été remboursés et que 953 millions de dépenses de prime d'épargne logement ont été payées au moyen d'avances rémunérées consenties par le Crédit foncier de France...


Le ralentissement de la conjoncture dès le début 2008, puis l'accélération de la crise à partir de la faillite, le 15 septembre, de la banque d'affaires américaine Lehman Brothers " ont limité la croissance spontanée des recettes à 7,3 milliards, confirmant l'affaissement du dynamisme des bases taxables déjà constaté au cours des deux dernières années ", relèvent les magistrats financiers. Mais, ajoutent-ils, l'impact de la crise sur les recettes fiscales nettes a été " globalement limité en 2008 " et serait " au plus égal à 4 milliards ".


Les ressources nettes de l'Etat ont diminué de 4,6 % en 2008 : elles sont en retrait de 11,2 milliards par rapport à 2007. A la différence des années précédentes, 2008 a été marquée par une baisse sensible des recettes fiscales nettes (- 6,7 milliards) et non fiscales (- 730 millions). A elle seule, la poursuite de la politique d'allégements fiscaux a induit une diminution de recettes de 7,6 milliards, souligne la Cour. La gauche n'a cessé de critiquer le paquet fiscal présidentiel, qui cible selon elle les plus aisés des contribuables et prive le gouvernement de marges de manoeuvre budgétaires. Elle appréciera cette précision.


S'agissant des dépenses, les critiques de la Cour des comptes sont encore plus nettes : la norme fixée par le gouvernement (une stabilisation en volume) " n'a été respectée, formellement, que parce que l'inflation (2,8 %) a été sensiblement plus forte que celle prévue dans la loi de finances initiale (1,6 %) ". Les dépenses du budget général ont crû de 2,8 % et celles de l'ensemble de l'Etat de 3,4 % (alors que l'objectif était de 1,9 %), observent les magistrats financiers.


Comme en 2007, la Cour plaide pour une norme de dépenses élargie à une partie des remboursements et dégrèvements (90 milliards en 2008), à la totalité des prélèvements sur recettes aux collectivités locales, aux recettes affectées aux opérateurs, aux comptes spéciaux et aux budgets annexes. Elle relève aussi que la lecture de l'exécution budgétaire est compliquée par le poids des dépenses fiscales (allégements d'impôts, exonérations...). Ces fameuses " niches fiscales " au nombre de 486 ne sont indolores qu'en apparence pour les finances publiques. Elles ont représenté 70 milliards en 2008 (+ 7 % par rapport à 2007), " soit l'équivalent de 21 % des dépenses totales du budget général ".


Le déficit de 2008 a représenté un cinquième (20,2 %) des dépenses de l'Etat et le quart (25,4 %) de ses recettes nettes. Avec de tels chiffres, il apparaît que ce que pouvait faire le gouvernement en 2008 en matière de soutien conjoncturel était limité. Le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, que la Cour des comptes prépare pour le débat d'orientation début juillet, doit permettre d'en savoir plus sur 2009 et 2010, deux années où l'impact de la récession devrait, cette fois-ci, être particulièrement fort.


Claire Guélaud


Les comptes 2008 de l'Etat certifiés avec 12 réserves


Pour la troisième année consécutive, la Cour des comptes a certifié les comptes de l'Etat. Elle avait le choix entre la certification avec ou sans réserve, le refus de certifier ou son impossibilité.


Comme pour les comptes 2007 et malgré des progrès, sa position est assortie de 12 réserves dont 9 substantielles. Elles concernent entre autres, la valeur des actifs de la défense, le patrimoine immobilier de l'Etat (62,4 milliards) et l'absence de comptabilisation dans le bilan de l'Etat de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades). Une telle opération aurait dégradé de 80 milliards la situation nette de l'Etat au 31 décembre 2008. Celle-ci s'est creusée de plus de 29 milliards, à -686 milliards du fait notamment de l'envolée de la dette.



 

Article publié dans le journal Le Monde du mercredi 27 mai 2009 (www.lemonde.fr)

 

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