ADOMA : je t’aurai, je t’aurai !
ADOMA : je t'aurai, je t'aurai !
Un auditeur de l'audience du tribunal correctionnel de Marseille où comparaissait Charles le 29 juin m'a adressé le courrier suivant que nous reproduisons de manière anonyme, comme il le souhaite. A cette audience peu banale, un millier de manifestants qui s'étaient donnés rendez vous sur le Vieux Port avaient accompagné le prévenu jusqu'aux portes du tribunal.
Danielle JEAMMET de Rouge Midi
Dans le cadre de mes activités je devais me rendre le 29 juin à l'audience de la 7ème chambre du tribunal correctionnel. A l'arrivée je trouvais un dispositif inhabituel : barrières, policiers en nombre...A mes questions on me répondit qu'était convoqué ce même jour un syndicaliste, Charles Hoareau, qui était accusé de violences et qu'il y avait des manifestants. J'avais entendu parler de cette affaire sans savoir de quoi il retournait et j'avais une sorte de curiosité amusée en gravissant les marches. Comme me l'avais dit un policier à l'entrée : « ça change un peu, ça met de l'animation ! ». Un peu intrigué je montais au 1er étage. J'attendais encore devant la porte quand Hoareau, que je connaissais pour avoir vu sa photo dans les journaux, est arrivé. Les portes se sont ouvertes et nous sommes rentrés. L'affaire Hoareau fut appelée en premier et je pus entendre l'acte d'accusation qui me donna d'abord envie de rire : « avoir le 7 avril 2009 menacé quelqu'un en pointant le doigt vers lui et en lui disant : « Je t'aurai, je t'aurai ». On peut donc passer en correctionnelle pour ça !
A cette accusation sont ajoutées deux autres qui normalement ne mènent pas en correctionnelle mais peuvent donner lieu à des amendes : avoir pris quelqu'un par le cou et lui avoir donné un coup de poing qui ne l'a que frôlé( ?) ce qui a provoqué un choc psychologique( ?) ayant entraîné un arrêt de travail de 4 jours( ?), avoir craché sur un autre. J'avoue que j'étais de plus en plus intrigué et amusé et que j'attendais avec impatience les explications de cette affaire.
La présidente du tribunal décorutique le dossier qu'elle a visiblement bien épluché avant, lit, tire des conclusions ne donnant qe rarement la parole à l'accusé qui nie les faits pour le couper aussitôt et mettre en doute toutes ses explications. Au début de l'énoncé des faits je pensais que Charles Hoareau, pris d'un accès de colère avait pris à partie quelqu'un alors qu'il était seul avec lui, mais au fur et à mesure de l'audience je comprenais que les faits incriminés s'étaient passés dans un tribunal où 30 salariés qui n'étaient plus payés depuis 18 mois, avaient protesté contre le report d'une audience qui étaient la...19ème de leur affaire ! La première question qui me vint : pourquoi dans ces conditions s'il y avait eu bousculade était-il le seul accusé ? On le considérait comme le seul fauteur des troubles ?
Puis à un moment donné, alors que la présidente le harcelait de questions et l'interrompait sans cesse, Charles Hoareau eut cette phrase qui me fit sursauter : « Mais enfin ça c'est passé au tribunal, à 5h de l'après midi, il y avait plein de gens présents, comment ça se fait qu'ils [les plaignants] n'ont aucun témoin ? J'ai demandé à avoir la vidéo mais ce n'était pas possible ! Le rapport de police ne confirme pas les dires de mes accusateurs. » Et c'est là que je me suis d'un coup rendu compte que Charles Hoareau était accusé sans preuve, par des gens qui n'avaient pas de témoin, à part une employée d'un des deux directeurs...et qui n'était même pas venue à la confrontation demandée par l'accusé !
A l'inverse Charles Hoareau avait plusieurs témoins dont un avocat qui confirmaient ses dires.
Malgré cela le harcèlement continuait à tel point qu'à un moment donné l'avocat de Hoareau lui dit : « Arrêtez-vous ! Ne répondez plus ! On n'est pas dans un débat accusation contre défense ! » mettant ainsi en cause la magistrate qui accusait sans cesse avec un part pris étonnant.
Le tribunal détaillant tout devant un accusé qui ne se démontait pas ni ne s'énervait, il y eut l'épisode du coup de poing qui aurait raté sa cible. Dans ma tête je me disais : « Mais comment c'est possible ? Hoareau tenait d'une main Le Mons par le cou et de l'autre il n'a pas pu l'atteindre avec son poing ? Il n'a pas l'air d'avoir un bras plus court que l'autre ! ». Franchement cette accusation aurait mérité une reconstitution !! D'autant que Le Mons a déclaré ne pas avoir esquivé le coup mais que celui-ci l'avait effleuré...
Puis il y eut l'épisode risible où l'un des deux accusateurs voulut mimer la scène où Charles lui aurait craché dessus afin d'expliquer pourquoi un avocat présent à 1 mètre de lui n'aurait rien vu ! Comme l'a dit cet avocat « s'il y avait eu quelque chose je l'aurais vu ou alors j'ai besoin de lunettes ! » Et les policiers présents à ce moment là aussi...
Enfin il y eut les plaidoiries. Maitre Dossetto, l'avocat des plaignants qui est aussi l'avocat des régies et - détail important - était donc présent le 7 avril, jouant sur le mot camarade ne cessa de fustiger Charles qui « se prenait pour un pacha », se permettait d'avoir un comité de soutien et se croyait au dessus des lois grâce à « ses troupes ». A l'entendre je me disais que la présidente qui avait demandé « Mais pourquoi selon vous ils s'en prendraient à vous ? », avait sa réponse. Je n'en revenais pas de la haine envers cet homme accusé d'être un meneur.
Sur les 3 faits reprochés il requit la relaxe pour le crachat au nom d'un aspect juridique que je n'ai pas compris (de toutes façons vu les explications vaseuses sur cette question je ne vois pas comment ça pouvait tenir), 1000€ d'amende pour le coup de poing fantôme et 4 mois avec sursis pour les « menaces ».
Vint enfin la plaidoirie de la défense pour cette affaire qui a duré 2 heures. Parmi les arguments avancés :
Ce que je ne comprends pas c'est pourquoi Me Dossetto qui était présent ce jour là a refusé de témoigner ; En pareil cas, si mon client avait été agressé, j'aurais témoigné pour que justice lui soit rendue !
Oui Charles Hoareau c'est un meneur et s'il n'était pas là ces femmes de ménage ne se seraient pas révoltées ni aussi bien défendues depuis 18 mois et c'est cela qu'on veut lui faire payer ! »
Et puis il y eut ce passage étonnant : « On a regardé le passé judiciaire de Hoareau sur des faits qui aujourd'hui sont non avenus mais dont on a parlé quand même [2], mais on n'a pas regardé le casier judiciaire de M. Le Mons. On n'avait pas à le faire et je n'ai pas le droit de vérifier mais on m'a parlé de plaintes de salariés pour violences, menaces... » De là où j'étais j'ai vu M. Le Mons se tasser sur la chaise accusant visiblement le coup. Tiens, tiens...
Que dire de plus ?
Un témoin anonyme des faits et jusque là citoyen tranquille.
[1] Unité de Médecine Légiste qui fait foi devant les tribunaux NDR
[2] En 1998 Charles qui avait tenté de s'opposer à l'expulsion d'un sans papier, avait été accusé, alors qu'il était seul, d'avoir blessé deux policiers lors d'une charge de CRS !!! NDR
Article publié sur le mardi 30 juin 2009 site http://www.rougemidi.org/