Loi HPST : quelle place pour les élus locaux ?
Loi HPST : quelle place pour les élus locaux ?
Le 15 juin dernier, avait lieu au Sénat un débat sur "la loi hôpital, patients, santé et territoires (HPST), un an après", sous la présidence de Gérard Larcher. Alain Milon, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la loi HPST, y déclarait notamment, à propos de la nouvelle gouvernance de l’hôpital : "le conseil de surveillance pourrait jouer un rôle important. L’implication des élus et le choix des personnalités qualifiées seront à cet égard déterminants…". S’exprimant dans un article publié par les Cahiers hospitaliers de mai, Jean-Pierre Fourcade, sénateur des Hauts-de-Seine, écrit : "La première des questions qui se pose au sujet de la gouvernance (hospitalière) est relative au positionnement des élus : vont-ils prendre de la distance par rapport au fonctionnement de l’hôpital ou, au contraire, leur implication va-t-elle rester la même, du fait de l’importance que revêt l’hôpital dans la vie locale ?" Dans un document de l’institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), "Agences régionales de santé – Promotion, prévention et programmes de santé", on peut lire, à propos des orientations régionales fortes qu’auront à prendre les ARS : "Cela ne sera possible qu’en donnant aux collectivités territoriales une place reconnue, sachant qu’aucune politique de santé publique et de prévention ne peut se bâtir sans elles."
Quelle place donc pour les élus locaux dans le dispositif mis progressivement en œuvre dans le cadre de la loi HPST ? Leur implication, leur positionnement sont présentés comme déterminants, voire pouvant poser question, tant au niveau de la nouvelle gouvernance de l’hôpital qu’à celui des orientations régionales en matière de santé publique et de prévention.
Des acteurs incontournables
Quant aux élus eux-mêmes, "ils se veulent des acteurs incontournables", titrait en décembre dernier les Cahiers de la fonction publique : "Les élus adhérents de l’association nationale des villes pour le développement de la santé publique "Elus, Santé publique et territoires" (ESPT) veulent faire des communautés locales les maillons essentiels de la toute récente territorialisation du système de santé par la loi HPST. Leur arme : la connaissance du terrain et un diagnostic fin des besoins. (…) Ils veulent saisir l’opportunité de cette loi pour prendre toute leur place dans la définition des besoins de santé et s’imposer comme des interlocuteurs naturels dans la nouvelle gestion territorialisée du système de santé par les agences régionales de santé (ARS). (…) Ils veulent utiliser à plein les contrats locaux de santé pour se positionner comme les partenaires locaux de l’ARS pour le diagnostic et le pilotage des politiques de santé au niveau de leur territoire."
Les élus locaux et les ARS
De fait, du côté des agences régionales de santé (ARS), les élus locaux sont présents : dans le conseil de surveillance, au niveau de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie et au sein de deux commissions de coordination des politiques publiques de santé.
Le conseil de surveillance d’une ARS, présidé par le préfet de région, comprend vingt-quatre membres, dont quatre représentants des collectivités territoriales. Son rôle : approuver le budget et le comptes financiers ; émettre un avis sur le plan stratégique régional et sur les contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM). Les premiers CPOM seront signés avec le conseil national de pilotage des ARS, en octobre prochain, pour une durée de quatre ans.
La conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA), présentée souvent comme un véritable "parlement" du sanitaire et du social réunissant une centaine de membres, est composée de huit collèges, dont le premier est celui des collectivités territoriales. Celui-ci comprend trois conseillers régionaux, le président du conseil général (ou son représentant) de chaque département de la région, trois représentants des groupements de communes (désignés par l’assemblée des communautés de France) et trois représentants des communes (désignés par l’association des maires de France). Le décret du 31 mars 2010 précise aussi l’organisation des travaux de la CRSA en commissions : une commission permanente et quatre commissions spécialisées (prévention, organisation des soins, prises en charge et accompagnements médico-sociaux, droits des usagers du système de santé), chacune d’elles comprenant des représentants des collectivités territoriales. Selon l’article L.1432 du Code de la santé publique, c’est la CRSA qui fait "toute proposition au directeur général de l’ARS sur l’élaboration, la mise en œuvre et l’évaluation de la politique de santé dans la région."
Les collectivités territoriales sont également associées aux deux commissions de coordination des politiques de santé, l’une dédiée à la prévention, l’autre au "médico-social". Les élus locaux y participent, entre autres, à l’élaboration du projet régional de santé (PRS) et du schéma régional de prévention (SRP), mais aussi au schéma régional d’organisation médico-social. Les représentants des collectivités territoriales sont : "deux conseillers régionaux, ou en Corse, deux conseillers de la collectivité territoriale, élus en son sein par l’assemblée délibérante ; le président du conseil général, ou son représentant, de chacun des départements situés dans le ressort territorial de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie ; quatre représentants, au plus, des communes et des groupements de communes, désignés par l’association des maires de France." (Décret n° 2010-436 du 31 mars 2010).
Conseil de surveillance versus conseil d’administration
Quid des représentants des collectivités territoriales aux conseils de surveillance des établissements publics de santé, lesquels remplacent les conseils d’administration ? Réponse du décret n°2010-361 du 8 avril 2010 : "Les conseils de surveillance composés de neuf membres (ndlr : soit les conseils de surveillance des établissements de ressort communal) comprennent au titre des représentants des collectivités territoriales : le maire de la commune siège de l’établissement principal, ou le représentant qu’il désigne ; un représentant d’un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont la commune siège de l’établissement est membre ou, à défaut, un autre représentant de la commune siège de l’établissement principal ; le président du conseil régional du département siège de l’établissement principal ou le représentant qu’il désigne." Au total trois représentants des collectivités territoriales. Quant aux conseils de surveillance composés de quinze membres (établissements de ressorts intercommunal, départemental, régional ou interrégional), le nombre desdits représentants passe à cinq (selon la même règle du tiers), dont le maire de la ville où l’hôpital est implanté, ou son représentant, voire le président du conseil général, le président du conseil régional, et autres représentants… selon le ressort de l’établissement. Le président du conseil de surveillance, élu pour cinq ans, est obligatoirement un élu territorial… ou une personnalité qualifiée. A charge pour ledit conseil de contrôler la gestion de l’établissement et de se prononcer sur les questions stratégiques.
Certains cependant voient dans la substitution du conseil de surveillance au conseil d’administration une restriction des pouvoirs des élus, selon un principe qui voudrait qu’on « ne surveille pas comme on administre ». Autres critiques allant dans le même sens : la composition du conseil de surveillance est plus restreinte et sa présidence ne revient plus de droit à un élu local.
Guy Malherbe
Source : connexite.fr (24 juin 2010)